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PELERINAGE A NOTRE-DAME DES VERTUS

1ER MAI 2014

PELERINAGE A NOTRE-DAME DES VERTUS

1ER MAI 2014


En montant ici à cette chapelle Notre-Dame des Vertus, le 1er mai, nous venons

honorer l’époux de la Vierge Marie sous le vocable de « Saint Joseph artisan ». Cette

démarche nous permet de prier pour le monde du travail, pour notre travail, pour nos

collaborateurs au sein de l’entreprise, depuis l’ouvrier jusqu’au chef d’entreprise.

Les vertus, vous le savez, ce sont les forces que Dieu nous donne et qui nous

permettent d’agir pour le bien de tous, selon l’Evangile de Jésus Christ, dans l’Eglise.

Nous pouvons alors nous demander quelles sont les vertus liées au travail ?

En premier lieu, le travail doit être source de dignité. C’est une vertu fondamentale

qui rappelle que nous avons été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu créateur.

Or le travail nous engage sur le chemin de la co-création. L’homme, en travaillant,

participe à l’édification du monde. Il continue l’oeuvre de Dieu en étant au service de

l’homme. Il faut bien reconnaître que les deux grandes idéologies du 19e siècle, liées

au travail, le communisme et le capitalisme, ont provoqué d’immenses et intenses

rutpures avec la notion de co-création. Le communisme a asservi l’homme dans sa

dimension collectiviste, le détournant complètement de la notion de dignité, lui

retirant la responsabilité et l’honneur. Le capitalisme n’existe plus aujourd’hui que

dans une vision que l’on appelle ultra-néo-libérale, ayant oublié l’homme pour mettre

l’argent au coeur de tout le raisonnement de déploiement de l’entreprise. Ici aussi

l’homme est esclave d’une réalité invisible, ultra-puissante et ultra-angoissante. Le

monde du travail moderne est un monde déshumanisé. La jeunesse qui se prépare au

travail l’a d’ailleurs bien compris en ne cherchant souvent pas d’abord un travail qui

l’honore dans son humanité, voire qui pourrait être une vocation, mais en cherchant

un salaire large et généreux permettant ainsi de goûter aux plaisirs de la vie. Alors la

notion d’effort, véritable vertu du travail, devient un boulet dans une idéologie qui

vante d’abord la facilité. Si Dieu s’est reposé le 7e jour de la création, c’est bien parce

qu’il y a au coeur de tout acte créateur, une fatigue, saine, presque belle, qui invite au

repos, à la contemplation, à la reprise de sens, à la célébration de l’acte créé, à la

reconnaissance que l’homme n’est pas le centre de l’univers, à la louange

d’appartenir à un monde beau et bon dans lequel nous avons notre place.

Face à ce désarroi d’un système actuel rempli de contradictions notamment par

rapport aux salaires, à la retraite, à la mobilité géographique, aux projets des

entreprises, l’Eglise n’a pas de troisième voie à proposer. Elle donne seulement des

exemples et saint Joseph en est une des images très accessibles. L’effacement de

Joseph dans l’Evangile ne dit pas qu’on l’ignore mais témoigne de sa manière de

laisser à Dieu la première place. L’éducation donnée à Jésus fait de lui un père que

l’on peut sans peine imaginer viril et doux. Viril dans le rapport au travail et dans les

relations avec les personnes qu’il rencontrait : Jésus porte en lui ce trait dans toutes

les rencontres de l’Evangile. Doux dans la capacité à transmettre à Jésus l’extase face

aux belles choses du monde et l’émerveillement de la vie plus forte que la mort.

Joseph est une grande et belle figure de ce que l’Eglise propose dans sa doctrine

sociale. Une doctrine qui n’est pas un programme politique, économique ou social,

mais une doctrine qui rappelle sans cesse que tout développement pourra recevoir la

vertu de juste quand l’homme est au coeur de l’entreprise. Aussi bien dans le

processus créatif de la société que dans les relations qui composent les membres de

l’entreprise au juste ratio des responsabilités de chacun en fonction de ses

compétences, de ses capacités à les développer, dans une harmonie saine, virile et

douce.

Le capitalisme ultra-néo-libéral n’est ni sain, ni viril, ni doux. Il est impur, tyrannique

et violent. Il imprime dans le coeur de l’homme une tension permanente qui ne lui

permet plus de travailler dans des conditions sereines. Je n’ai pas besoin de vous

parler des angoisses liées au travail, à l’évolution des entreprises, aux combats pour

la dignité et la reconnaissance de chacun. Il ne serait pas inopportun parfois de nous

poser la question de l’origine de ces angoisses. Quand on voit les rapports des enfants

au coeur de l’école, sur la compétition à la meilleure note et les attitudes de requin qui

prévalent au moment des concours, on peut s’interroger sur le système scolaire.

L’école est l’antichambre du monde du travail et nous n’avons pas trop d’énergie à

travailler à changer de cap pour l’éducation des enfants. Ce tableau peut vous

apparaître très noir et nous devons reconnaître que beaucoup d’hommes et de femmes

échappent heureusement à cette situation. C’est une de nos vocations de repérer ces

lieux d’épanouissement au coeur du travail et des valoriser. C’est aussi une de nos

vocations de retrouver le chemin des vertus dans le monde du travail et cela

commence à l’école. Et même déjà dans nos maisons, dans nos familles.

Les vertus de saint Joseph pourront nous aider ainsi à garder espoir au coeur de notre

monde. Nous voulons prier aujourd’hui pour dire que ce monde n’est pas pourri, qu’il

est aimé de Dieu et que nous y avons été plantés pour être des semeurs d’espérance et

des gages de dignité. Nous voulons prier pour que le modèle présenté à nos enfants

puisse être adouci, assaini, purifié en profondeur, car notre humanité n’est pas

chargée de vivre dans l’angoisse, la méfiance et la peur. Nous voulons prier pour tous

ceux qui aujourd’hui n’ont pas de travail, désespèrent et sombrent dans un

inactivisme qui n’a rien à voir avec le repos du dimanche tel que le Seigneur Dieu l’a

institué. Nous voulons prier pour tous les professeurs afin que les écoles transmettent

aux enfants l’amour de l’effort et la joie du travail bien accompli, chacun en fonction

de ses capacités. Nous voulons prier pour tous les décideurs du monde du travail afin

que notre société contemporaine, en paix avec les pays voisins, puisse aussi être en

paix en son sein, en donnant à chacun le travail qui lui rendra sa dignité d’être créé,

appelé à participer au bien commun.

Nous prions Notre-Dame des Vertus pour que les vertus de saint Joseph aujourd’hui

et demain puissent être reçues en nos vies et que nous puissions montrer au monde

que l’Eglise est le lieu d’une intelligence du rapport des hommes avec la matière et

avec la vie.

En célébrant l’Eucharistie, nous portons le pain et le vin sur l’autel, fruit de la terre et

du travail des hommes : demandons au Seigneur que chaque messe soit un repos pour

nos vies, en contemplant Jésus qui se rend présent dans le travail de nos mains.

Amen.

Geoffroy de la Tousche

Curé de Dieppe

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